Le bio… logique?
(1ère partie)

Yves Allard

C’est l’enfer… J’ai beau essayé d’obtenir l’heure juste à propos des aliments « bio », pas moyen de me faire une idée… 

Tout a commencé lorsque Marco Lavallée (directeur général de la Société d’Agriculture de Richelieu) m’a fait parvenir un texte sur le sujet : selon une étude menée par l’Agence des Normes de l’alimentation de la Grande Bretagne, l’alimentation biologique n’offrirait aucun bénéfice nutritif de plus que l’alimentation conventionnelle… Oh boy… Je vois déjà une poignée de manifestants sortir ses pancartes! Le pire, c’est qu’il s’agit supposément de l’étude la plus complète réalisée jusqu’à maintenant sur le sujet… Alors essayons donc d’y voir un peu plus clair… 

Les défenseurs de l’alimentation biologique (pas juste ceux avec les pancartes) insistent pour dire que les aliments bio…  bios… (euh… une abréviation… ça se met-tu au pluriel?)… sont meilleurs pour la santé. Bien sûr, bien des gens affirment que les aliments bio ont meilleur goût, mais j’aurais tendance à croire que la provenance de ceux-ci peut l’altérer (j’ai décidé de laisser « bio » au singulier finalement… je n’aimais pas le look avec un ‘s’… ça me faisais trop penser au terme ‘BIOS’ qui signifieBasic Input Output System’ (système élémentaire d'entrée/sortie)… un ensemble de fonctions contenu dans la mémoire morte (ROM) de la carte mère d'un ordinateur lui permettant d'effectuer des opérations élémentaires lors de sa mise sous tension… :o). Mais revenons à nos bouts de Q-tips frisés géant sur quatre pattes…  

Si un aliment est produit localement de façon biologique, difficile de croire qu’il n’aurait pas meilleur goût une fois sur les tablettes de votre supermarché qu’un autre qui aurait subit les pesticides ou contiendrait des agents de conservation… Mais si un aliment biologique est produit au Mexique par exemple, là en plus d’être loin de chez nous, les normes agroalimentaires diffèrent des nôtres… Ça peut sûrement faire une différence, non? 

Certains se souviennent peut-être du DDT, un pesticide qui était fort répandu dans les années cinquante, soixante et soixante-dix. Le Dichlorodiphényltrichloroéthane  (ne vous en faites pas, je ne savais pas ce mot là par cœur… J’arrive à peine à le lire!) fut le premier pesticide synthétique à voir le jour, les débuts de son utilisation remontant à la Seconde Guerre mondiale. Dès les années soixante, des problèmes environnementaux graves furent recensés, menant à des restrictions de grande envergure sur son utilisation. Notez que le Dr. Mueller reçut tout de même, en 1948, le prix Nobel de médecine pour cet insecticide puisqu’il fut un remède efficace contre la malaria et autres maladies provenant des insectes. Toutefois, aujourd’hui, il est totalement interdit dans au moins vingt-six pays et nous savons maintenant, entre autres, que le DDT affecte le système nerveux… Certains le lient même directement à la maladie de Parkinson! 

Même si son utilisation est interdite au Canada depuis 1985, il est encore utilisé dans plusieurs pays comme le Mexique, là d’où nous proviennent plusieurs aliments, même bio (non, je n’ai rien contre le Mexique… C’est juste un exemple!). Pouvons-nous être certains que ces aliments n’ont pas été affectés par un quelconque produit du genre? Les zones agricoles étant ce qu’elles sont, il y a quand même des chances qu’un champ d’agriculture dite bio soit juste à côté d’un autre qui n’est pas bio pantoute, non? Essayer de garder l’effet des pesticides sur un terrain sans en affecter le voisin, ce n’est pas un peu comme essayer de délimiter une zone pipi dans une piscine publique ça? 

Bon, d’accord… Je vais peut-être un peu trop loin… Loin de moi l’idée de semer la panique ou de mettre en doute la bonne intention liée à l’importation d’aliments bio, car, d’un autre côté, je ne crois pas qu’un aliment bio soit nécessairement désavantagé par rapport à un qui ne l’est pas… Sauf peut-être en ce qui concerne le prix! 

Alex Binkley, journaliste, termine un texte en écrivant : « si les consommateurs veulent dépenser plus d’argent pour des aliments biologiques, c’est leur choix. Mais ils seraient prudents de ne pas succomber aux mythes que l’étude britannique et d’autres ont mis en évidence »… En même temps, Renée Frappier, professeure en alimentation naturelle et cofondatrice de l'Association Manger Santé Bio, insiste pour dire que « les recherches démontrent avec évidence une proportion nettement plus élevée de vitamines et minéraux. La croissance dans un sol mieux nourri avec des intrants plus naturels et des cultures plus diversifiées ajoutent à la valeur nutritive de l'aliment ». 

Ok… On fait quoi avec ça? Y’a comme un genre de légère et subtile contradiction on dirait… 

Et disons que vous faites fi de l’étude britannique et que vous croyez que les aliments bio sont meilleurs pour votre santé. Eh bien, il faut rester vigilant lorsque vous lisez l’étiquette sur un produit. Certaines compagnies utilisent des moyens de transformation qui diminuent la qualité initiale du produit, mais mettent tout de même en évidence la mention biologique sur celui-ci. Donc, lorsqu’un produit est transformé, il n’est pas toujours certain qu’il s’agisse encore d’un aliment sain et nutritif… En voulez-vous des ambiguïtés! 

La production alimentaire biologique, c’est une industrie de cinquante milliards à travers le monde et, aujourd’hui, la plupart des épiceries ont une section d’aliments bios (ah… cette fois je viens de mettre un ‘s’ à bio… bof… un de temps en temps… ;o). Même les chiens ont maintenant droit à de la nourriture biologique, les cinq plus gros fabricants de nourriture pour animaux ayant tous lancé des gammes "bio"! 

Mais jusqu’à maintenant, pas moyen de savoir si c’est vraiment meilleur pour la santé… Je vais donc poursuivre mes recherches afin de décider si, lors de ma prochaine visite à mon supermarché, je m’arrêterai dans l’allée bio pour me procurer certains produits… (Ouin… je dis « lors de ma prochaine visite »… Mais en réalité, je dois me rendre au supermarché dans quelques minutes et je n’aurai pas beaucoup de temps. Alors, je vais probablement juste acheter ce que je suis habitué d’acheter… Pas facile de changer nos habitudes!) 

Grâce aux nombreuses études faites sur le sujet, les « Bio » sont maintenant rassurés et contents de savoir qu’il y a vraiment plus de vitamines dans leur bouffe… Les autres sont heureux de ne pas payer plus cher pour du bio puisqu’ils savent maintenant qu’il n’y a pas de différences au plan nutritif…  

Donc, suite à de sérieuses études scientifiques, nous ne sommes peut-être pas certains de ne peut-être pas être en mesure de ne peut-être pas pouvoir se faire une opinion sur le sujet… ou peut-être pas! 

Pas le choix… je continue mes recherches… ;o)

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