Production de pleurotes à Saint-Ours
Les Champignons Advitam, une jeune entreprise en croissance

Hélène Goulet

Marie-Claude Héroux possède une formation universitaire en littérature. Grégoire Dorval, pour sa part, a complété une maîtrise en microbiologie appliquée après avoir complété un baccalauréat en biochimie.

En 2005, en quête de nouveaux défis, le couple décide de quitter Montréal pour s’implanter en quelque part le long du Richelieu. Ils ont arrêté leur choix sur Saint-Ours.

« Nous avons acheté quatre murs et un plafond qui coule ! » lance en riant Marie-Claude Héroux, lors d’une entrevue réalisée par Le Monde agricole.

Mais le potentiel de la bâtisse était là. Il ne fallait que du courage et beaucoup de patience pour procéder aux rénovations nécessaires à la mise sur pied de leur petite entreprise.

Au départ, le couple pensait se lancer dans la production de plantes médicinales, mais il a vite constaté que ce marché était saturé. Entre-temps, Marie-Claude Héroux avait suivi une formation sur la culture du pleurote.

C’est donc à la culture de ce champignon encore relativement méconnu des consommateurs que le couple a décidé de se consacrer. Ils ont appelé leur entreprise Les Champignons Advitam.

« C’était un beau défi et nous avons la chance de former une équipe », fait remarquer Mme Héroux. « Nous avons chacun nos fonctions. Grégoire s’occupe de l’aspect technologique et innovation et moi, de la production et de la mise en marché… Et je ne reviendrais jamais en arrière ! » assure-t-elle.

La culture de la pleurote, qui s’effectue sur de la paille, diffère de celle du traditionnel champignon de Paris qui se fait sur du fumier.

Si on compte plus d’une centaine d’espèces de pleurotes, une quarantaine de variétés seulement son cultivées pour la consommation. Cette année, le couple Héroux-Dorval a décidé de produire du pleurote en huître (brun-gris) et du pleurote de l’orme (blanc-beige), qui peuvent être produits avec le même procédé.

La production se fait entièrement à l’intérieur. « Ainsi, nous contrôlons tout et nous pouvons reproduire l’environnement nécessaire à la culture », précise Mme Héroux.
 

En laboratoire, Grégoire Dorval utilise du seigle pour coloniser les semences.

L’aventure débute en laboratoire, où Grégoire Dorval prépare la colonisation de la semence en utilisant du seigle. Ce procédé permet d’enrichir la production. Seigle et semence sont placés dans des pots Masson durant deux semaines.

Par la suite, on utilise des ballots de paille sans intrant. Cette paille est hachée, humidifiée et pasteurisée avant de pouvoir y incorporer le mycélium qui a évolué en laboratoire.

En fait, précise Grégoire Dorval, le consommateur se trouve à manger la fleur (chapeau ou carpophore) du champignon. Le champignon, c’est la racine (mycélium).

Paille et mycélium sont ensuite placés dans de grands sacs en plastique en forme de tubes, suspendus et percés d’innombrables trous, desquels sortiront les champignons sous forme de grappes. Ce procédé prend environ quatre semaines à arriver à son terme. Durant ce temps, le champignon « mange » la paille, explique Grégoire Dorval. Après une période d’incubation de deux semaines, on donne un choc thermique et on baisse le CO2 afin de simuler l’automne.

« Ce procédé est utile puisque le champignon est propre, nous n’avons pas besoin de le laver, et c’est meilleur pour la conservation », note Mme Héroux.

Les compétences de M. Dorval en biotechnologie permettent par ailleurs à ce dernier d’envisager différentes applications commerciales et industrielles en procédant à l’extraction d’enzymes de champignons. Toutefois, cela fait partie de projets futurs qui n’ont pas encore été dévoilés.

« Pour l’instant, il faut stabiliser notre production », soutient-il.

Le couple a pour objectif d’atteindre une production de 200 kilogrammes de champignons par semaine, et ce, durant toute l’année. Mais il faut de la patience car les équipements sont encore en rodage et on doit procéder à des ajustements. L’année dernière, qui en fut une de tests, on a produit 60 kilos de champignons. Cette année, au moment de l’entrevue, la production avait démarré quelques semaines auparavant et avait atteint 40 kilos.

Grégoire Dorval et Marie-Claude Héroux bénéficient par ailleurs du soutien d’un mentor, Jean-Pierre Salvas (Fromagerie Polyethnique), ainsi que celui de la SADC et du CLD. « Ça apporte la confiance et plein de petits trucs comme savoir négocier un contrat. M. Salvas m’aide aussi dans la recherche et le développement et sur la recherche de subventions. »

Les Champignons Advitam peuvent pour le moment compter sur une dizaine de clients – restaurateurs, détaillants de fruits et légumes, petites épiceries – à Saint-Ours (AXEP), Saint-Bernard, Saint-Denis, Saint-Hilaire, Beloeil et Saint-Julie.

« J’essaie de ne pas trop m’éparpiller car actuellement, notre production n’est pas assez régulière pour étendre notre marché », admet Mme Héroux. Le fait que ses parents habitent la région de Beloeil n’est pas étranger à ce choix. L’année prochaine, toutefois, elle compte tâter le marché de Sorel-Tracy et Saint-Hyacinthe, en plus d’installer un kiosque à la ferme.

L’année prochaine, Mme Héroux et M. Grégoire comptent ajouter une nouvelle corde à leur arc en produisant du pleurote rose et du pleurote jaune, champignons qui seront cultivés à l’extérieur.

« Nous nous donnons également la mission de développer le goût du champignon chez les consommateurs », laisse enfin entendre Mme Héroux. Le Québec n’est en effet pas encore un grand consommateur de champignons, même si ça a évolué, la demande est à développer. « Actuellement, c’est le producteur qui dicte la demande », note-t-elle.
 

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