Domaine équestre du rang Nord
PASSION CHEVAUX !

Hélène Goulet

L’entrevue avec Charles Hamel se passe dans l’écurie. Nous sommes à Sainte-Victoire-de-Sorel, au Domaine équestre du rang Nord, propriété de Charles Hamel et Marie-Josée Morasse.

Installée sur des balles de foin, je prends mes notes sous le regard attentif des chevaux qui nous observent à travers le grillage de leurs stalles.

Même le chat Fred vient, à l’occasion, vérifier mes notes pour être sûr de ce que j’écris.


De gauche à droite, Brigitte Caplette (élève), Jade Arseneault-Monette (employée à l’écurie), Charles Hamel et Kim Perron-Coulombe (élève).


L’endroit sent bon le foin, on entend quelques hennissements et Treasury Roxy Shock, qui aimerait bien sortir de sa stalle mais qui y est confiné à cause d’une blessure au sabot, essaie d’attirer l’attention de son maître, Charles Hamel, occupé à répondre à mes questions.

Ce dernier habite Sainte-Victoire depuis 2005 avec sa conjointe. Originaire du comté de Portneuf, il travaillait auparavant à Saint-Hilaire et à Saint-Hyacinthe.

La présence, entre autres, de l’Association Quarter Horse du Québec, à Sorel-Tracy, qui présente depuis quelques années des compétitions équestres sur le site de la Société d’agriculture de Richelieu, à l’arrière du Colisée Cardin, a décidé le couple à venir s’installer dans le Bas-Richelieu pour y ouvrir le Domaine équestre du rang Nord.

« Avant, nous n’avions que quatre chevaux, et maintenant, nous en avons treize », précise M. Hamel. L’écurie compte également une douzaine de chevaux en pension.



« Nous offrons la pension pour les chevaux, des cours d’équitation, que ce soit de la plaisance western ou de la selle anglaise, ainsi que l’élevage et l’entraînement pour les compétitions », fait savoir M. Hamel, qui précise qu’il ne fait pas l’élevage de chevaux de course.

Selon lui, la clientèle est surtout composée d’adolescents, mais elle compte également quelques adultes. Actuellement, c’est un peu la saison morte car on donne environ une dizaine d’heures de cours par semaine. À partir du printemps, ce nombre d’heures montera à 25, estime-t-il.

Sa conjointe, Marie-Josée Morasse, absente au moment de l’entrevue, donne les cours aux plus jeunes en plus d’enseigner au sein de la Fédération équestre du Québec. Mme Morasse est également enseignante pour les infirmières auxiliaires au Centre Bernard-Gariépy de Sorel-Tracy, et s’occupe de la comptabilité de l’entreprise.

Quant à Charles Hamel, c’est lui qui « fait la job de bras » selon ses propres mots. « Dans une entreprise comme la nôtre, il faut pouvoir toucher à tout et tout faire par nous-mêmes », explique-t-il.



Le domaine s’est donc amélioré avec le temps. Aujourd’hui, M. Hamel est particulièrement fier de son manège intérieur, immense aréna recouvert d’un matériau blanc, beaucoup plus lumineux et agréable que les arénas traditionnels en aluminium froids et humides.

L’endroit compte également un manège extérieur, une écurie d’été, un lac et une piste pour la course. Et cela, c’est sans compter la trentaine de brebis, les poules et les chiens qui y vivent.

Le cheval, une bête de caractère

Le caractère d’un cheval est un critère très important à considérer, note M. Hamel.

Dès la naissance, l’entraînement débute. Durant les premiers jours, le maître apprivoise le poulain peu à peu en le flattant et en le touchant afin qu’il puisse reconnaître son odeur. Le cheval est prêt à être monté vers 18 à 20 mois. Les chevaux montés par les élèves ont un minimum de quatre ans afin de respecter les exigences des assureurs.

Selon M. Hamel, il faut constamment évaluer le caractère du cheval. « Lorsque je récupère un cheval, j’essaie de voir jusqu’où il est capable d’aller. S’il a mauvais caractère et qu’il n’est pas récupérable, il prend le chemin de l’abattoir. S’il est beau, il peut être vendu à l’encan. »

Mais il faut dire que ça prend du temps pour se rendre là, car Charles Hamel est patient et aime ses bêtes. Chanceux, le très grand cheval de race Thorough Bred qu’il a récupéré, alors qu’il avait une double fracture à la patte, en sait peut-être quelque chose.

M. Hamel a sauvé ce cheval qui aurait dû en principe être abattu. « Ce cheval avait fait des niaiseries en jouant. J’ai alors évalué son mental et décidé de le garder. Quand on a réussi à le sauver, on l’a appelé Chanceux. »

Un autre de ses chevaux, Treasury Roxy Shock, serait, s’il était humain, ce qu’on considère un hyperactif. Lui aussi s’est blessé en faisant des niaiseries, explique son maître. Aujourd’hui, il a le sabot fendu. Un sabot prend environ huit mois à repousser au complet et M. Hamel estime qu’il ne sera guéri que dans trois mois environ. « En principe, il ne faudrait pas qu’il bouge ! »

Seulement, Treasury Roxy Shock voudrait bien aller jouer dehors. Il s’ennuie dans sa stalle et caracole pour attirer l’attention. Récemment, il a été castré –pour le calmer davantage – après avoir été le père de plusieurs poulains. Mais son caractère vif et sa remarquable intelligence lui ont valu une attention particulière de la part de son maître, chez qui on sent une grande affection à l’endroit de ce cheval, son préféré semble-t-il.

« Ce cheval est très intelligent, il est même capable d’enlever ses fers lui-même !!! » s’exclame-t-il, un brin de fierté dans la voix, en expliquant comment l’animal est capable de réaliser cet exploit en trouvant une emprise pour accrocher le derrière de son fer et en tirant sur sa patte, de façon à ce que le fer se détache de lui-même.

Treasury Roxy Shock a aussi gagné quelques prix en compétition, un aspect important pour la réputation de l’éleveur. « Ça montre qu’il a été bien dompté et c’est aussi intéressant pour le bridage », fait valoir M. Hamel.

À cet égard, l’insémination est la méthode utilisée par M. Hamel, qui la juge moins risquée.

Et quand la jument est sur le point de pouliner après 11 mois de gestation, Charles Hamel veut être présent. Pour ce faire, il a installé une caméra dans sa maison située tout juste à côté, afin de pouvoir intervenir rapidement. Lorsque la jument montre des signes qu’elle est sur le point de pouliner, elle est installée dans une stalle spéciale où elle peut être observée grâce à la caméra.

M. Hamel fait également l’évaluation des chevaux qui seront utilisés pour les cours à l’intention de ceux et celles qui ne possèdent pas leur propre cheval. « Je m’assure que le cheval ira bien avec la personne », explique-t-il. Chaque cheval, selon son caractère, peut être utilisé pour les cours, pour la compétition ou comme jument poulinière. À l’occasion, M. Hamel utilise également les chevaux de ses pensionnaires contre une diminution des coûts de pension, ce qui profite à tous. Cela dit, fait-il savoir, le cavalier qui pratique le reining (une catégorie de compétition) possède son propre cheval, car il s’agit d’une discipline où la complicité doit être très grande entre la bête et son maître.

Malgré tout ce travail, M. Hamel déplore le fait qu’il est difficile pour un éleveur tel que lui d’obtenir de l’aide financière, car offrir des cours et la pension pour chevaux n’entrent pas dans les critères utilisés pour obtenir une subvention gouvernementale. « J’ai réussi toutefois à avoir une petite subvention du ministère de l’Agriculture, des Pêches et Alimentation du Québec (MAPAQ), mais il faut travailler très fort. » Si les coûts reliés au chauffage sont relativement peu élevés – les chevaux dégageant leur propre chaleur – il n’en va pas de même pour les coûts reliés aux assurances, qui sont très élevés, avoue-t-il.

« On ne fait pas beaucoup d’argent avec la pension », ajoute-t-il en exemple. « Un cheval coûte environ 150 $ pour son entretien mensuel – ce qui exclut l’entretien de la stalle - alors qu’on charge 300 $ par mois. »

Mais bon, quand on fait ce qu’on aime, on supporte ce genre d’irritant, semble-t-il conclure.

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