Le suicide : la mauvaise solution permanente à un problème temporaire…
(1ère de 2 partie)

(Par Yves Allard)

Comme me le disait un jour un de mes amis suite au suicide de son ex-conjointe : “le suicide, c’est une mauvaise solution permanente à un problème temporaire »… C’est vrai, les problèmes liés aux éléments ou évènements qui mènent bien souvent des gens à porter le geste fatal peuvent à toutes fins pratiques toujours être réglés si on utilise les bons moyens… Le problème réel étant le sentiment que l’on ressent, et non la situation elle-même.

Du 30 janvier au 5 février 2011, c’est la 21e Semaine nationale de prévention du suicide. Cette année, c’est sous le thème « Le suicide n’est pas une option ! » que celle-ci se tient afin de sensibiliser le plus de gens possible à ce problème qui nous touchera possiblement tous un jour, de près ou de loin. Oui, car en comptant les personnes ayant eu des idées suicidaires, celles qui ont posé le geste fatal, leurs proches et les endeuillés, le suicide toucherait chaque année environ 700 000 personnes vivant dans notre belle province. Sur une période de 10 ans, en supposant que le suicide ne touche pas plus d’une fois les mêmes individus, on parle de 7 millions de personnes qui seront touchées de près ou de loin par celui-ci, soit la quasi-totalité de la population actuelle du Québec.

Bien que j’avais dans l’idée de produire un texte sur le sujet depuis déjà un certain temps, les informations que je trouvais sur le net étaient si nombreuses et variées que j’avais un peu de difficulté à résumer le tout afin de pondre quelque chose de concis et pertinent. Puis, Alain Beaudin (commissaire agricole) me suggéra une rencontre avec France Sylvestre, responsable de la formation au Centre de Prévention du Suicide (CPS) Pierre-de-Saurel.

C’est lorsqu’on rencontre des gens comme Mme Sylvestre que l’on comprend mieux l’ampleur des besoins chez nous et la nécessité d’offrir des services adaptés et disponibles à quiconque en ressent le besoin. Mme Sylvestre porta à mon attention des faits, des statistiques, des signes avant-coureurs, des fausses-croyances… Bref, elle me fit un résumé très intéressant des différents aspects du suicide.

J’ai donc pu compléter mon texte sur le sujet grâce à cette rencontre des plus enrichissante, mais en bout de ligne, je me suis retrouvé avec un texte de sept pages, soit bien plus qu’il n’en faut lorsqu’on a l’intention de publier un texte « à la une » sur le web. Bien que toutes ces informations me semblaient fort pertinentes, je dois maintenant couper le tout de moitié… Tout un défi!

Ok, gardons au moins quelques statistiques : entre 1981 et 2005, 31 000 Québécois se sont enlevés la vie… Non mais y avez-vous pensé? 31 000 personnes en un peu plus de 20 ans… C’est presque l’équivalent de la population de la ville de Sorel-Tracy qui disparait en l’espace d’une seule génération!

Ça représente une moyenne de plus de 1200 suicides par année au Québec (plus de 3 par jour!), alors que cette moyenne est d’environ 3600 à l’échelle canadienne pour cette même période. Donc, environ le tiers des suicides du pays sont commis par des Québécois. Et bien que la tranche la plus « à risque » soit celle des 35 à 49 ans, soulignons que le suicide est la première cause de décès chez les 20 à 34 ans… Incroyable, non? Et le suicide fait de plus en plus de victimes chez les personnes âgées, un phénomène préoccupant dont il faut tenir compte.

Un des éléments qui a retenu mon attention : c’est en région que le taux de suicide est le plus élevé… Pas à Montréal ou à Québec à cause du stress de la ville, non, mais plutôt dans des coins plus éloignés et moins populeux. Ce qui m’a rapidement fait penser à la campagne… Et bien évidemment, au monde agricole.

À ce sujet, alors qu’on a pu observer une légère diminution du nombre de suicides un peu partout au cours des dernières années, celui-ci aurait augmenté de façon significative en milieu agricole à différents endroits. Chez nous, Mme Sylvestre a rencontré il y a quelques temps une douzaine de producteurs agricoles afin d’en apprendre un peu plus sur la gestion du stress et la demande d’aide. Il m’est évidemment impossible pour le moment de divulguer les résultats de cette enquête, mais, fait intéressant remarqué au cours de celle-ci, les gens rencontrés étaient très ouverts et intéressés à discuter du sujet. Alors que certains n’ont pas hésité à faire part des difficultés qu’ils vivaient au quotidien et expliquer de quelle façon cela les affectait, d’autres se renseignaient sur les signes à surveiller ou quoi faire si l’on soupçonnait des tendances suicidaires chez un de nos proches.

Ginette Lafleur, doctorante à l’UQUAM, travaille quant à elle à l’élaboration d’un document complet concernant les impacts du suicide en milieu agricole. Cette dernière épluche les données des coroners sur une période couvrant  plus de 10 ans afin de dresser un portrait réel du suicide en milieu agricole ici au Québec. Les résultats de ces deux démarches devraient connus en avril prochain et je compte bien y revenir en temps et lieu.

Une chose est certaine, le métier d’agriculteur est un métier à risques quand on parle des possibilités d’avoir un jour des pensées suicidaires. Selon plusieurs, l’isolement fait assurément partie de l’équation lorsque les problèmes qui surviennent semblent devenir trop lourds à porter. On est souvent seul aux champs, les différents services offerts sont en milieu urbain, on est habitué de « s’arranger tout seul »… Mais on a tous besoin des autres à un moment donné dans notre vie, c’est tout à fait normal, et quand on ressent une certaine détresse, on ne devrait jamais hésiter à contacter le Centre de prévention du suicide (CPS). Ces organismes sont là pour faciliter nos démarches, et vous n’aurez pas à vous taper les heures d’attentes à l’urgence ou à essayer d’obtenir un rendez-vous dans une clinique médicale. De plus, les gens sont entraînés à faire face à de telles situations et parfaitement en mesure de faire le nécessaire pour favoriser le retour à des jours meilleurs.

À suivre…

À ne pas manquer ce Jeudi 3 Février 19h30 à l’auditorium du Cégep Sorel-Tracy:

Conférence de Michael Sheehan : « La magie de l’écoute pour prévenir et soulager la détresse »

Michael Sheehan, juge à la Cour du Québec dont un de ses fils s’est suicidé, est bénévole au Centre de prévention du suicide de Québec et à Solidarité-Deuil d'enfant. L'implication de M. Sheehan lui a valu le Prix de la justice et la reconnaissance de nombreux intervenants en lien avec la prévention du suicide.

Simplement cliquer sur le lien ci-dessous pour de plus amples informations :

http://www.cpspierredesaurel.com/prevention-du-suicide/dernieres-nouvelles.php

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